SEBASTIEN
« Qui sommes-nous ?
Tentative désespérée d’une
nuit ou plutôt d’une vie,
De répondre ne serait-ce qu’un instant
à cette interrogation lancinante,
Je vois la lumière et les
ombres, confrontation, sommes-nous l’ombre de nous
même, la lumière du paraître,
l’ombre de notre intimité, la lumière
de notre cœur.
J’entends ces mots qui résonnent en moi
comme d’innombrables diapasons qui
m’entraînent vers je ne sais quoi.
Sensations étranges qui vous prennent au ventre et qui ne
vous lâchent plus comme si chaque geste, chaque
éclat de voix, chaque mot vous emmenaient au-delà
de vous-même.
Et puis en fait j’ai mal
d’être là, de voir ces quatre femmes,
ses quatre corps, tenter d’aller vers ses rives que je
connais trop, celles où le doute est si fort que votre corps
est prêt à éclater.
Tout cela est peut-être un
rêve, une projection de l’esprit et puis
même ! Il vient du plus profond, de cet au-delà
où l’on ne peut tricher, les émotions
vous envolent, vous engloutissent et vous laissent comme un con, sur la
berge, détrempé, hagard, perdu…
Mais heureusement le mot attendu surgit, l’espoir
renaît, CROIRE encore et toujours en ce qu’on veut,
je m’en fous, mais croire que notre vie, que la vie
c’est maintenant, que l’amour c’est
maintenant, croire bordel !!
Merci à vous pour ce cadeau que l’on appelle le
don de soi, enfin je crois.
;. »
GERARD
«J'écris cela tant
que le spectacle est encore frais dans ma mémoire.
Je suis un affectif, et je suis venu presque exclusivement pour [celles
que je connais], plutôt que pour Fernando Pessoa. Et dans ce
spectacle, quand on vient pour les gens, le fait inattendu,
incontournable et très marquant est bien
évidemment la nudité des actrices.
Une nudité qui m'a fait
largement oublier le texte, car même mal placé (au
quatrième rang) et ne voyant pas souvent la baignoire et les
baigneuses, j'étais au sens littéral sous le
charme de leur féminité et de leur
sensualité, et j'entendais donc leur voix plutôt
que le contenu de ce qui était dit.
Mais une nudité qui, parce
qu'elle est associée à des émotions de
qualité plutôt qu'au porno soft qui fait notre
environnement quotidien, fait un bien fou et embellit la vie.
Je suis très impressionné par le courage et
l'engagement qu'il faut à ces jeunes filles pour jouer
ainsi. Il m'est impossible de rester indifférent
à des personnes qui donnent tout de cette
manière-là, et je voudrais donc leur transmettes
de bonnes vibrations en retour de celles qu'elles ont fait passer ce
soir, de bonnes vibrations basées sur tout le respect et
l'affection que je peux éprouver pour elles […]
Je tiens d'autant plus à transmettre ce respect et
cette affection que je sais trop, par mes lectures et par des
récits qu'on me fait de temps en temps en tête
à tête, quelles petitesses et quelles violences
verbales et physiques peuvent se déchaîner contre
les femmes qui se dévoilent.
[…]
ADRIEN
Je voudrais remercier toute l'equipe d'Entre-Deux pour son
interprétation du marin.
Il n'y a pas longtemps, j'ai pu voir une
autre mise en scène de cette piece, et c'est ce qui m'a
permis de mieux comprendre comment on peut la percevoir et
l'interpréter différemment.
En lisant la pièce littéralement, on devine des
femmes seules et on s'imagine une monotonie dans leur comportement.
Cette lecture conduit à des mises en scène comme
celle que je viens de citer, c'est à dire lentes, et
insistant sur la compréhension du texte qui est assez
complexe.
Cette facilité, tu l'as
surmonté en proposant des femmes vivantes reprenant les mots
non pour les citer mais pour les vivre. Cette approche permet de
retranscrire toute la poésie de Fernando Pessoa tout en
comprenant ses interrogations quant à la perception brumeuse
de la vie.
Une mise en scene
très intelligente donc, qu'il me tarde de revoir.
|